Articles Tuesday, October 10, 2023
La Clinique juridique du Barreau
Un lieu de formation et un levier pour l’accès à la justice
By Marie-Hélène Paradis
L’accès à la justice est au cœur des préoccupations du Barreau du Québec. La révision du programme de formation professionnelle de l’École du Barreau a mené vers la mise sur pied de la Clinique juridique du Barreau. Celle-ci offre aux étudiants un apprentissage de type expérientiel et leur permet de développer leurs compétences professionnelles de façon concrète. De surcroît, la Clinique contribue à élargir l’accès à la justice, notamment pour les citoyens qui n’ont pas accès à l’aide juridique sans pour autant avoir des revenus suffisants pour consulter un avocat.
La Clinique juridique du Barreau du Québec est issue de la plus récente refonte du programme pédagogique de la formation professionnelle dispensée par l’École du Barreau, laquelle mène au permis d’exercer le droit au Québec. Ce tout nouveau programme de formation reflète la pratique du droit d’aujourd’hui. Il est obligatoire pour devenir membre du Barreau du Québec et avoir le droit de pratiquer comme avocat. Le parcours des étudiants bacheliers en droit a été révisé pour leur permettre de transiter plus aisément de la théorie à la pratique, pour mieux les préparer à l’exercice de la profession et contribuer ainsi au développement des habiletés et des compétences requises pour affronter adéquatement les réalités de la pratique auprès des employeurs et des clients.
Le nouveau parcours en trois blocs
Le programme de formation professionnelle de l’École du Barreau se déroule en trois blocs.
Le premier est axé sur l’autoformation et la mise à niveau des connaissances en droit acquises à l’université. À la fin de cette étape, les étudiants doivent se soumettre à un premier examen en droit appliqué, à choix multiples. Puis, les étudiants reçoivent, durant environ deux semaines, une formation en présence dans les locaux de l’École en théorie de la cause et rédaction, suivie d’un examen à développement. Pour terminer ce premier bloc, une formation d’environ deux semaines, en présentiel, est dispensée en éthique, déontologie et pratique professionnelle, et elle est également suivie d’un examen à développement. Le seuil minimal de réussite aux trois examens est de 60 %; ceux-ci doivent être réussis par les étudiants pour accéder au second bloc de la formation. Il est à noter que les étudiants bénéficient de trois tentatives pour réussir chacun des trois examens.
Le second bloc de la formation est celui de l’apprentissage expérientiel. D’une durée de 14 semaines, il permet aux étudiants de participer à des cliniques techniques et à la Clinique juridique du Barreau. Les deux premières semaines sont des semaines d’intégration pendant lesquelles les étudiants viennent en classe pour se familiariser avec la mission, la vision, les valeurs de la Clinique ainsi que les outils utilisés. On y parle aussi des écrits usuels des avocats, comme les lettres et les courriels, en plus de les former sur les différentes techniques de consultation.
Pendant les dix semaines suivantes, les étudiants et les étudiantes prennent part aux rencontres de la Clinique juridique qui a lieu les mardi, mercredi et jeudi. Sept domaines de droit sont offerts aux citoyens qui consultent à la Clinique juridique : le droit de la famille, le droit civil, le droit social/administratif, le droit du logement, le droit des successions et le droit du travail (rapports individuels). L’apprentissage des étudiants en clinique juridique et les conseils qu’ils prodiguent aux citoyens se font sous la supervision étroite d’avocats en exercice, inscrits depuis cinq ans ou plus au Tableau de l’Ordre, assurés par le Fonds d’assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec et se conformant à une vérification disciplinaire.
Le lundi et le vendredi sont consacrés aux cliniques techniques qui permettent aux étudiants de compléter et parfaire les compétences professionnelles qu’ils doivent développer et de mettre celles-ci en pratique. Ils doivent aussi faire de la rédaction avancée en droit des affaires ou en droit civil, se familiariser avec la représentation des clients en droit civil ou pénal et perfectionner leurs techniques de négociation en rapport collectif de travail.
La troisième et dernière étape de leur formation – ou troisième bloc - est celle du stage en milieu de travail d’une durée de six mois.
La Clinique juridique du Barreau : services et fonctionnement
Me Maryse Bélanger est la directrice de la Clinique juridique du Barreau. Elle rappelle qu’il est possible, pour tout citoyen habitant au Québec et âgé de 18 ans ou plus, d’obtenir de l’information et des conseils juridiques pour mieux connaître ses droits et ses obligations, pour obtenir une opinion juridique, pour savoir comment agir à la suite de problématiques juridiques ou encore pour comprendre le fonctionnement du système judiciaire. « Les étudiants, ajoute-t-elle, peuvent aussi aider les citoyens à monter leur dossier ou à préparer une audience, une séance de médiation ou de conciliation. La représentation devant les tribunaux et la médiation ne sont toutefois pas des services offerts pour le moment. »
« Les consultations se déroulent en français ou anglais, en présentiel dans l’un de nos quatre centres de formation professionnelle (Montréal, Québec, Sherbrooke ou Gatineau) ou de façon virtuelle. »
« Chaque citoyen a droit à deux rencontres de quarante-cinq minutes, à deux semaines d’intervalle. À la première rencontre, les étudiants posent des questions en vue de bien identifier les besoins et de définir précisément le mandat. Ils ont deux semaines pour faire le travail de recherche, la rédaction de l’avis juridique, de procédure ou de mise en demeure par exemple. Le professeur-superviseur, quant à lui, révise et approuve le travail avant la prochaine rencontre pendant laquelle les réponses et les explications seront transmises aux clients. Le travail en duo des étudiants et les rôles d’interlocuteur principal ou secondaire qui alternent dans les différents domaines de droit prodiguent un complément de formation important. »
Le projet pilote
Avant d’être officiellement lancée en septembre 2023, la Clinique juridique a d’abord été un projet pilote, entre octobre 2022 et mars 2023. Cinquante-cinq étudiants volontaires y ont pris part. Ce projet pilote a permis au Barreau et à l’École d’évaluer l’efficacité de la formation auprès des étudiants et de la clientèle citoyenne. Les étudiants ont participé à un sondage portant sur les différentes activités, le travail exigé et l’encadrement dont ils ont bénéficié. Les résultats ont été positif : de façon majoritaire, les étudiantes et les étudiants ont estimé indispensables ou très pertinentes les différentes activités d’apprentissage prodiguées par la Clinique. Ils ont déclaré être majoritairement très satisfaits de la nouvelle démarche de formation.
Un sondage a aussi été proposé aux 273 clients qui ont consulté la Clinique juridique durant le projet pilote. Les résultats recueillis ont indiqué un haut taux de satisfaction. Les clients ont apprécié la gratuité des services et jugé la Clinique très utile pour connaître leurs droits, les aider à les faire valoir, l’accompagnement pour être guidé dans le système de justice, et l’opportunité d’éviter une judiciarisation de leur dossier grâce aux renseignements obtenus.
Le programme, incluant l’apprentissage expérientiel de la Clinique juridique du Barreau, est maintenant obligatoire pour les quelque 1 550 étudiants admis à l’École du Barreau en 2023-2024.
« En conclusion, on peut dire que la Clinique juridique répond clairement à un besoin d’accessibilité à la justice des citoyens et qu’elle permet aux futurs avocats de mettre en pratique les connaissances acquises durant leurs études, de travailler sur des cas réels et de bénéficier de mentorat personnalisé par des avocats expérimentés. La responsabilisation, la professionnalisation et le fait de bénéficier d’une formation concrète leur permettant de développer leurs compétences professionnelles dans une clinique juridique sous la supervision d’un professeur-superviseur sont des avantages certains », se réjouit Me Maryse Bélanger.