Dossiers mardi 28 septembre 2021
Des échecs qui font réfléchir
Par Marie-Hélène Paradis
Jamais confronté à l’échec avant la troisième session du baccalauréat, ce premier de classe se pose des questions sur son choix de carrière. « Suis-je fait pour être en droit? Suis-je à ma place? Un ami à qui j’en ai parlé m’a dit : Vas-y tranquillement, ce n’est qu’un cours parmi tant d’autres, reprends-le. C’était un bon conseil, que j’ai suivi. »
Me Pascal Lévesque a tenté d’identifier pourquoi il avait eu un échec et en essayant de comprendre, il s’est aperçu que là où il habitait, il ne pouvait se concentrer. Il a donc changé de milieu de vie pour un endroit plus propice aux études pour la dernière année. « Si je n’en avais pas parlé, j’étais prêt à débarquer du programme. Ça donne de la perspective. L’École du Barreau a toujours été difficile, un milieu très compétitif. Je passais toujours sur la limite et, au dernier examen, il y a eu échec. J’étais découragé, c’était le dernier bloc. Il me manquait quatre points au bloc représentation pour la note de passage, mais j’ai réussi, au final, à surmonter cet échec. »
Contrairement à ce qui se fait habituellement, Me Lévesque ne s’est pas lancé dans la course au stage. Ça ne l’attirait pas, ça ne lui ressemblait pas. « Je voyais ça comme si on m’imposait de la compétition là où ça n’avait pas lieu d’être. Ce n’était pas dans mes valeurs, mais il faut quand même faire un stage », dit-il. Il a fait un essai, mais ça n’a pas fonctionné. Il a commencé à stresser et il est allé voir un petit bureau de deux criminalistes même s’il avait une appréhension à faire du droit criminel. « Révélation. C’est vraiment là que j’ai épousé la profession. J’ai appris beaucoup, les enjeux sont très grands en défense. Ce que je percevais comme un échec a été un déclencheur. » Par la suite, il est retourné aux études en relations internationales. Il avait toujours rêvé de travailler en diplomatie, mais ce fut un autre échec.
Il s’est ensuite enrôlé dans l’armée qui avait besoin d’avocats. « J’ai encore une fois fait fi de mes appréhensions. L’armée, c’est transformationnel. Mais encore une fois, à la sixième semaine de la formation de base, je me suis planté dans l’examen sur la sécurité des armes et je venais de refuser une entrevue pour un poste chez Hydro Québec. J’étais découragé, mais mon adjudant m’a dit de persister, que l’on avait besoin de professionnels comme moi dans les Forces armées canadiennes. Je suis passé devant un comité et me suis fait cuisiner pendant plus d’une heure. Je suis devenu officier et j’ai fait 15 ans dans les Forces armées. Toutes les compétences acquises dans les Forces armées, je m’en suis servi pendant ma carrière par la suite. »
Me Lévesque n’a jamais consulté, mais a toujours parlé avec ses mentors ou avec un proche qui a connu le même genre d’expérience. « Il faut toujours se préserver au point de vue émotionnel, ne pas manquer d’égards envers le client. On ne contrôle ni le juge, ni les témoins, ni les éléments. On fait du mieux que l’on peut. Il faut se garder cette valve de sécurité. » Me Lévesque confirme que ses parents ont fait confiance à son jugement et l’ont toujours appuyé. La formation militaire lui a aussi appris qu’un plan de match, ça peut changer. « Si j’avais fait quelque chose qui n’était pas en adéquation avec mes valeurs, ça aurait été plus pesant psychologiquement. La carrière de juriste est un marathon, pas un sprint. On ne peut pas être compétitif tout le temps. Plusieurs des gens qui ont gagné la course aux stages, il y a environ 25 ans, ne sont plus dans la profession. »
« Être fidèle à soi-même, être ouvert aux expériences que tu peux vivre, mais le plus important, être fidèle à ses principes. Il n’y a rien de pire que de faire un travail qui n’est pas en adéquation avec ses principes et ses valeurs. Voilà le conseil que je peux donner à tous les jeunes qui commencent leur carrière. »